Sauramps

Accident ferroviaire

Benoît VIVIEN

Le pire accident de train jamais survenu en France a eu lieu en Savoie en 1917, durant la 1ère guerre mondiale, avec un bilan de 425 morts parmi 1 200 passagers militaires partant en permission depuis une zone de front en Italie.

Le transport ferroviaire est l’un des, si ce n’est le moyen de transport le plus sûr, mais expose à des accidents potentiellement graves avec un grand nombre de victimes.
Il existe deux grands types d’accidents ferroviaires, chacun pouvant être à l’origine de l’autre :
• Les collisions, entre trains et/ou avec un véhicule terrestre, en particulier sur un passage à niveau ;
• Les déraillements, spontanés (vitesse excessive), ou suite à un défaut ou affaissement de la voie ferrée (rail ou aiguillage défectueux, glissement de terrain…).


Les deux principaux risques pour les primo-intervenants sont d’une part le maintien du trafic ferroviaire sur les voies adjacentes, et d’autre part sur une voie électrifiée le risque lié aux caténaires tant que l’électricité du réseau n’est pas coupée.
Les accidents impliquant un train de fret de transport de matières dangeureuses (TMD) exposent à un risque chimique et/ou d’incendie/explosion (hydrocarbures).
Un accident ferroviaire dans un tunnel, a fortiori lorsqu’il est suivi d’un incendie, peut être à l’origine d’un dégagement de fumées, toxiques pour les passagers et les primo-intervenants.

La localisation précise du site de l’accident sur la ligne ferroviaire se fait par le point kilométrique (PK) qui permet d’identifier le point d’accès routier le plus proche.
Le risque terroriste ou plus simplement malveillant doit être évoqué lors d’un accident de train.

Les accidents de trains surviennent sur des voies ferrées parfois sur des zones particulièrement difficiles d’accès par voie terrestre et/ou héliportée :
• tunnels, ponts et viaducs ;
• voie ferrée à distance de toute infrastructure d’accès routier.
Un accident de train peut être à l’origine de victimes à l’intérieur et/ou à l’extérieur du train (quai d’une gare).
Il existe une incertitude pour l’évaluation initiale du nombre de victimes, qui dépend surtout du nombre de passagers, sans préjuger de l’impact éventuel sur l’environnement (pollution chimique) ou de la survenue d’un sur-accident (TMD).
La cinétique élevée du train lors de l’accident peut être à l’origine de polytraumatismes majeurs, avec plusieurs mécanismes lésionnels pour les passagers du train :
• chocs directs à l’origine de lésions osseuses et plus généralement traumatismes fermés (membres, crâne, thorax, rachis, bassin) ;
• lésions de décélération (coeur et gros vaisseaux) ;
• lésions par compression et incarcération ;
• traumatismes ouverts par projection ou impact d’objets contondants (tôles froissées) ;
• éjection.
Les difficultés d’accès pour les équipes soignantes sont de deux types : situation du train (rase campagne, tunnel, viaduc…), situation en hauteur des victimes dans un wagon sur voie nécessitant des échelles.
Les traumatismes thoraciques et crâniens représentent les deux principales causes de décès pour les victimes d’un accident de train.
Des amputations de dégagement peuvent être nécessaires pour dégager les victimes incarcérées dans des tôles très épaisses.
Le traumatisme psychologique est d’autant plus important que le train est réputé comme étant un moyen de transport extrêmement sûr.
L’hôpital le plus proche du site d’un accident de train peut être de petite taille, et risque d’être très rapidement saturé et dépassé par cet événement en cas d’afflux massif de victimes.

• L’accident de train est le modèle historique d’organisation de la chaîne médicale de l’avant telle que
décrite en médecine de catastrophe¹, et ce modèle reste toujours applicable²,³.
• Les premières équipes arrivant par voie héliportée peuvent prendre des photographies aériennes de la zone de l’accident, particulièrement utiles pour le déploiement de la chaîne médicale de l’avant (Fig. 1).
• Le DSM et le COS doivent prendre contact avec l’exploitant ou son représentant.
• Dans le cas d’un accident à proximité immédiate d’une gare, il est préférable
d’implanter le PMA au sein même de la gare. Après concertation avec le COS et le directeur de crise de l’exploitant un PMA peut être envisagé dans un wagon qui sera ensuite tracté jusqu’à une gare.
• L’acheminement de produits sanguins (concentrés globulaires, concentrés plasmatiques) sur le site de l’accident ou au PMA peut être nécessaire en cas de désincarcération prolongée et/ou d’évacuations prévisibles à distance.
• Dans le cas de désincarcérations prolongées,
il est nécessaire d’anticiper sur les renforts avec des équipes médico-chirurgicales.
• La prévention du crush syndrom est un des objectifs prioritaires de la prise en charge pré-hospitalière, et fait appel en particulier au remplissage
et à l’alcalinisation.
• L’organisation précoce de la prise en charge médico-psychologique et des passagers sans lésions somatiques ainsi que des proches de victimes et de patients décédés est essentielle.
• L’impact médiatique majeur d’un accident de train avec de nombreuses victimes impose une communication institutionnelle et des autorités de l’Etat, et non par les médecins intervenant directement sur le terrain.
• Les exercices de médecine de catastrophe simulant un accident de train sont essentiels en termes de formation pour se préparer à un tel scénario.

 

1. Médecine de Catastrophe (2e édition). Noto R, Huguenard P, Larcan A. Eds., Masson 1994, Paris.
2. Zoraster RM, Chidester C, Koenig W. Field triage and patient maldistribution in a mass-casualty incident Prehosp Disaster Med. May- Jun 2007;22(3):224-9.
3. Cryer HG, Hiatt JR, Eckstein M, et al. Improved trauma system multicasualty incident response: comparison of two train crash disasters. J Trauma 2010 Apr;68(4):783-9.