Sauramps

Régulation en situation de crise et de catastrophe

Benoit VIVIEN

Même si les événements à l’origine d’une situation sanitaire exceptionnelle (SSE) peuvent être très différents en terme de mécanismes, conséquences physiopathologiques, cinétiques, et thérapeutiques nécessaires (pandémie VS attaque terroriste…), ils possèdent des points communs, dans leur évolution naturelle, stratégies et plans mis en oeuvre pour leur faire face.

Chaque SAMU dispose d’une salle de crise permettant de monter en puissance en cas de débordement d’activité ou de SSE. Cette salle doit fonctionner en interface avec les centres d’appels et de commandement des pompiers et autres services impliqués.

Chaque SAMU départemental est responsable de la gestion d’un événement avec de multiples victimes sur son territoire. Mais dès que le nombre de victimes dépasse les capacités de ce seul SAMU départemental, la coordination des moyens médicaux venant en renfort est placée sous l’autorité du SAMU zonal de rattachement. Il existe 12 zones de défense en France, dont 7 sur le territoire métropolitain¹.

Le plan ORSEC (Organisation de la Réponse de la SEcurité Civile) comporte de multiples dispositions spécifiques. La plus importante en terme de secours et de soins est le plan NOVI (Nombreuses Victimes)².

Le dispositif ORSAN (Organisation de la Réponse du système de santé en situations SANitaires exceptionnelles) mis en place par le Ministère de la Santé en 2014 a pour objectif l’organisation de la montée en puissance progressive et coordonnée du système de santé au cours des SSE. Il est décliné en 6 volets : AMAVI (dont AMAVI damage control), MEDICO-PSY, EPI-VAC, CLIMATIQUE, NRC, REB³.

Lorsqu’un événement quel qu’il soit produit un grand nombre de victimes/patients, il existe une unicité du mécanisme lésionnel, avec pour conséquences :

  • des lésions/pathologies qui seront de même nature, seules variant alors l’intensité et la gravité ;
  • un diagnostic simplifié, seule l’évaluation de la gravité devenant essentielle pour le triage, la thérapeutique immédiate, et l’orientation hospitalière.


Dès l’alerte donnée, l’échange réciproque d’informations entre SAMU, SDIS et police/gendarmerie est essentiel pour organiser la filière de soins  pour chaque victime, qui va de la chaîne médicale de l’avant jusqu’à l’admission hospitalière régulée par le SAMU.

L’objectif de la régulation médicale par le SAMU en cas de SSE est l’élargissement de la surface de réponse hospitalière en sollicitant l’ensemble des établissements de santé adaptés et disponibles.

Le plan ORSEC NOVI (ex-Plan Rouge), en gérant sur site et en fractionnant les flux pré-hospitaliers de victimes, peut être considéré comme un rempart contre la saturation hospitalière, évitant ainsi le déclenchement du Plan Blanc Hospitalier.

L’anticipation de la régulation des destinations hospitalières est la règle, et la recherche systématique des places hospitalières disponibles, avant même les premiers bilans, permet d’une part de mettre en alerte les services hospitaliers contactés, et d’autre part d’avoir un état des lieux  précis des capacités hospitalières immédiates.

La simplification du diagnostic permet rapidement de mettre en face de l’afflux de victimes une réponse standardisée, en terme de protocoles de soins sur le terrain et de régulation médicale des destinations hospitalières.

La mise en place d’un poste de commandement du SAMU sur le site même de la catastrophe permet d’optimiser la régulation des destinations hospitalières. Il doit fonctionner en étroite collaboration avec la régulation du SAMU départemental (ou zonal) pour la recherche et la centralisation des informations sur les disponibilités hospitalières et les évacuations.

En cas d’événement multi-site, un PC SAMU (ou à défaut uniquement un médecin régulateur) sur chaque site, permet de gérer les évacuations hospitalières à partir du site considéré. La coordination est alors assurée par le SAMU départemental (ou zonal).

Les évacuations doivent être gérées au niveau de la sortie du PMA pour éviter les « évacuations sauvages », vers des hôpitaux non préparés à recevoir les victimes, ce qui pourrait conduire à des décès injustifiés.

Aucun patient ne doit quitter le PMA (ou le PRV en cas d’extrême urgence) sans régulation médicale préalable de sa destination hospitalière.

La régulation des destinations hospitalières doit tenir compte de plusieurs impératifs :

  • le plateau médico-technique nécessaire à chaque victime ;
  • la capacité d’accueil de chaque établissement de soins, public ou privé, mis en pré-alerte par la régulation médicale ;
  • les vecteurs d’évacuations disponibles, en particulier héliportés ;
  • le regroupement des victimes issues d’une même famille.


A l’échelon de chaque victime, 3 éléments dictent le choix du plateau technique, et donc la destination hospitalière :

  • sa gravité ;
  • la quantité de soins nécessaires ;
  • le temps de transport (terrestre ou aérien) prévisible.


La transmission des bilans, au sein de la chaîne médicale d’une part, et entre médecin régulateur et services hospitaliers d’autre part, doit être « ciblée » et concise par rapport aux bilans habituellement transmis en SMUR au quotidien. Les bilans doivent être transmis sous forme de groupes (« paquets ») de patients qui seront acheminés en convoi ou successivement vers un même service.

Un système de traçabilité de l’ensemble des victimes doit être mis en place, pour connaître en temps réel leur nombre, gravité, et destinations hospitalières. En France, cette traçabilité est habituellement effectuée à l’aide du Système SINUS⁴.

L’objectif est de revenir à une situation normalisée au plus tôt, tant au niveau pré-hospitalier sur le terrain qu’au niveau de la régulation médicale du SAMU.

1. Zones de défense : https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006071307&idArticle=LEGIARTI000036598574&dateTexte=20200822.
2. Plan ORSEC NOVI : https://www.interieur.gouv.fr/Archives/Archives-publications/Archives-infographies/Securite-des-biens-et-des-personnes/Securite-des-biens-et-des-personnes/Mobilisation-de-l-Etat-en-temps-de-crise/Le-plan-NOVI-NOmbreuses-VIctimes
3. Dispositif ORSAN : https://solidarites-sante.gouv.fr/systeme-de-sante-et-medico-social/securite-sanitaire/article/le-dispositif-orsan.
4. Système SINUS : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000030236009&categorieLien=id.